Quel peut donc être le sens de ces préférences générales pour la vie à la campagne ou à la ville, pour la vie d’action et la vie de plaisir, pour la retraite ou pour la société, sachant qu’outre la différence d’inclination entre les hommes, l’expérience personnelle de chacun peut le convaincre que ces genres de vie ont, chacun leur tour, leur agrément, et que c’est leur variété ou leur judicieux mélange qui contribue plus que tout à les rendre également agréables ?
Le Sceptique, Hume
Je feuilletais il y a peu un livret avec «
ses pages déjà jaunies » quand quelques mémoires se sont devenues vivantes. Je
voudrais les partager avec vous.
C’était lui aussi un étudiant universitaire
qui venait d’entrer à la faculté de philosophie, presque à la fin de la
première décennie des années 2000, dans une université de São Paulo. Avec un
répertoire philosophique précaire, l’unique livre de philosophie qui avait été
lu, un peu avant de commencer les études, c’était La République de Platon. Trouvé dans une librairie du « ABC
paulista » – un ensemble de villes situées dans la région métropolitaine de São
Paulo –, le livre avait la première de couverture blanche, le titre en rouge
bordeau et une figure en gris décoloré qui représentait la façade du Parthénon.
Un commentaire succinct en pied de page avait stimulé la curiosité : une œuvre fondamentale dans la trajectoire
de la pensée philosophique. Donc, dans cette librairie encore, le livre a
été pris en main, quelques-unes de ses pages ont été feuilletées et il y a eu
la décision de l’acheter. Ensuite, avec enthousiasme, le livre a été amené chez
moi et l’impatience de commencer la lecture était évidente. Quelques jours plus
tard, la lecture était complètement finie. Et c'était par là que la trajectoire
a commencé, et ce livre est chez moi jusqu'à aujourd'hui.
La journée a commencé par là, pourtant ce ne
sera pas par là que mes pas avanceront. Oui, je suis arrivé à cette conclusion,
déjà à la faculté, après la lecture des premiers textes philosophiques et après
avoir regardé quelques cours. L’un de mes professeurs qui dispensait une bonne
partie des cours sur Platon et en philosophie ancienne, professeur Paulo
Henrique, était une personne incroyable et extrêmement généreuse. Ses cours ont
été si importants qu’il était possible de construire une notion et de mieux
comprendre quelques aspects du Platonisme. Cependant, dès la première année de
ma formation, j’ai adopté une posture si prudente par rapport à la réception
des idées des philosophes avec lesquels cet étudiant, dans ce cas moi, aurait
un contact. Selon mon évaluation, il serait nécessaire d’avoir plus de temps
d’études et d’approfondissement dans les doctrines tout au long de l’histoire
de la philosophie pour qu’une position philosophique puisse être établie.
Alors, j’ai conclu que je ne serais pas platonique.
Avec l’avancement des cours, beaucoup de
débats et d’échange d’idées parmi les collègues, j’ai au fur et à mesure
découvert que mon répertoire philosophique, jusqu'alors précaire, était une
vertu. Mais, qu’est-ce que cela veut dire ? Je ne suis pas arrivé à
l’université muni de lectures, et dans ce sens, j’ai pu construire petit à
petit mes propres notions conformément à l’absorption des cours de professeurs
et professeures beaucoup plus expérimentés, qui ont consacré – et consacrent
encore – plusieurs années de vie aux études de la pensée. C’est-à-dire que je
ne suis pas arrivé à la faculté avec une notion préconçue sur ce que serait la
philosophie – d’ailleurs, on découvrira tout au long des cours que la question
« Qu’est-ce que la philosophie ? » est considérée par quelques penseurs et
penseuses comme l’une des questions philosophiquement les plus déconcertantes.
Plusieurs fois, l’interprétation d’un texte philosophique peut être équivoque.
Par ailleurs, elle peut émerger en tant que le résultat des conceptions
traditionnelles dénuées de fondement. Je ne suis pas arrivé à l’université muni
de ces lectures, pourtant j’ai souvent eu une disponibilité intellectuelle, si
je peux ainsi dire, considérée très bénéfique à l’exercice de la pensée. J’ai
toujours nourri beaucoup de curiosité face à l’inconnu. Ainsi, commencer à
suivre le parcours des chemins philosophiques au moyen de l’orientation des
professeurs et professeures spécialistes s’est révélé formidables.
J’ai toujours eu la pensée vivante depuis
mon adolescence. À l’université, découvrir ce que les autres philosophes
pensaient sur les sujets les plus variés était une manière de comprendre peu à
peu l’humanité qui habitait chez moi. Ainsi, je découvrais que mes inquiétudes
étaient le fruit de réflexion, et dans ce sens, elles faisaient partie du cours
de ma maturation. Dans un certain moment, j’ai eu l’impression qu’un avancement
significatif pourrait être fait à partir du moment où j’ai établi un contact avec
les textes du professeur Porchat dans son Rumo
ao Ceticismo, à travers les cours du professeur Piva, qui sera mon
directeur de recherches, une figure dont la générosité était exceptionnelle.
Donc, j’ai décidé de changer le cours de mes investigations et la direction de
ma réflexion pour mieux comprendre la proposition de « l’école » sceptique.
Deux aspects ont suscité mon intérêt pour mieux la comprendre : Le premier
aspect consistait en la prudence par rapport aux études des doctrines
philosophiques les plus diverses, c’est-à-dire avec l’établissement de la
tradition philosophique occidentale et la figure de Thalès, les lignes de pensées les plus variées et des écoles philosophiques ont été
développées tout au long de l’histoire de la philosophie. Dans ce sens, avec
toutes ces écoles, on a eu l’émergence de ce que le professeur Porchat a
compris être « o conflito das filosofias » ; le second aspect consistait en une
proposition très intéressante par rapport au scepticisme. Le sceptique, face
aux doctrines dogmatiques formulées par les écoles philosophiques les plus
différentes, toujours en conflit constant les unes avec les autres, et avec une
force persuasive également convaincante, suspend le jugement, et ensuite arrive
à la tranquillité. Tous ces enseignements, jusqu’alors inédits dans ma vie, ont
été le fruit des études consacrées tout au long des cours et de la
participation au groupe d’études sur le scepticisme, celui-ci sous la direction
du professeur Piva. Toutefois, comprendre philosophiquement que le scepticisme
n’est pas une doctrine, mais une habilité prend du temps – et avec moi, cela ne
sera pas différent. Pourtant, sa caractéristique la plus marquante consiste en
son trait persuasif. Sans parler de son caractère aporétique et zététique.
Comme je l’ai dit dans d’autres
publications, découvrir l’altruisme philosophique du médecin et philosophe
Sextus Empiricus, après avoir lu les Esquisses
Pyrrhoniennes, a été l’un des événements les plus marquants dans ma
trajectoire universitaire. Les textes de Sextus Empiricus ont été légués à
l’histoire de la philosophie en tant qu’un des principaux travaux sur le
scepticisme dans l’antiquité. Il y a différentes manifestations de la pensée
sceptique, et le travail de Sextus Empiricus est le fruit de la compréhension
du Scepticisme Pyrrhonien dont le
fondateur était Pyrrhus d'Elis (365-275 av. J.-C.). Ultérieurement, savoir que
dans l’Académie de Platon il y a eu
la manifestation du Scepticisme
Académique représentait un élément très important indiquant que mon chemin
était orienté vers le nord.
Dans l'après-midi d’un samedi, si je me
souviens bien, le jour était un peu gris, donc j’ai décidé de chercher quelques
livres chez un bouquiniste de la région du « ABC paulista ». J’avais besoin de
faire quelques devoirs de l’université, donc, c’était là que je pourrais les
trouver. Il y avait la bibliothèque de l’université où les livres pouvaient
être trouvés, sans doute, toutefois je voulais les acheter pour les avoir en ma
possession dans la mesure du possible. Le professeur Piva avait déjà formulé
des commentaires sur un livret qui s’appelait O que é Ceticismo, par Plínio Smith. Quand je suis arrivé chez le
bouquiniste, j’ai commencé à parcourir les étagères. Il y avait beaucoup de
livres. C’était formidable ! Quand je suis allé au rayon de philosophie, je
n'ai pas trouvé les livres que je cherchais, cependant j'ai trouvé un petit
livret dont « les pages étaient déjà jaunies ». J’imagine que le lecteur et la
lectrice doivent déjà savoir de quoi on parle. Oui ! O que é Ceticismo. J’ai tout de suite pris le livret et je commençais
à le lire à mon arrivée chez moi.
Après avoir parcouru quelques-unes de ses
pages, j’arrive au chapitre « O ceticismo mitigado de David Hume ».
On a eu l’occasion d’étudier la pensée de Hume la troisième année de la
faculté. À ce moment-là, quand on lisait Le
Traité de la Nature Humaine, j’avais déjà absorbé les cours en étant guidé
pour l’interprétation du scepticisme mitigé de Plínio Smith dans son O que é Ceticismo – Hume avait 27 ans
quand il a fini le Traité, son
premier livre, dont la composition consiste en trois volumes : Le premier livre
(De l'entendement) et le second livre (Des passions) ont été publiés en 1739 ;
d’un autre côté, le troisième livre (De la morale) avec « l’Appendice » ont été
publiés en 1740. Je dois faire un commentaire, dans cette circonstance, on a eu
très peu de temps pour s’approfondir dans la philosophie de Hume, et à ce
moment-là, au moins pour moi, sa pensée s’est présentée comme l’une des plus
déconcertantes et philosophiquement riches. L’origine des idées, le fondement
des inférences causales, le fondement de la morale, tous ces éléments
philosophiques étaient tellement féconds et originaux ! Tout cela devait être
compris en détail. J’ai voulu approfondir les études de la philosophie de Hume,
une fois qu’on a eu un panorama introductif. Tous les doutes, questions et
inquiétudes ont commencé à fermenter et j’avais besoin d’autres réponses. Je
suis devenu très curieux de découvrir d’autres aspects de la pensée de Hume.
J’avais décidé non seulement d’approfondir
les recherches dans le cadre d’un programme de master et de continuer à
approfondir les études sur « l’école » sceptique, mais aussi de développer un
travail de recherche sur le scepticisme mitigé de Hume. Eh bien, j’ai réussi la
sélection et je suis entré aux études du troisième cycle, en philosophie, dans
une université de Guarulhos. Mais cela n'est pas tout. J’avais décidé de
construire une carrière académique. Je suis très reconnaissant au professeur
Plínio pour la période consacrée à ma direction, et surtout, pour l’opportunité
d’avoir connu son interprétation sur le scepticisme mitigé de David Hume dans
son livret – très court, dont le contenu est non moins fécond. Son livre, O Ceticismo de Hume, mérite d’être lu
plusieurs fois – à chaque lecture, une nouvelle découverte. Malheureusement,
j’ai vécu une période très difficile tout au long du master et j’avais besoin
d’interrompre les études pour m’occuper de ma santé qui était très mauvaise à
l’époque. Toute cette situation a compromis l’avancement des recherches, ainsi
que l’avancement des travaux. Ma capacité de penser, de chercher et d’écrire
était très affaiblie dans ces circonstances. Aujourd’hui, je suis pleinement
récupéré, sain et mes capacités d’écriture sont rétablies.
Cette recherche n’a pas été concluante et
je n’ai pas pu concrétiser ma carrière académique. Toutefois, je maintiens dans
la mémoire avec joie les bons moments vécus, comme la pause café à la cantine,
les cours pendant les études du troisième cycle, le moment dans lequel j’ai eu
l’opportunité de dispenser des cours. C’était incroyable. Je maintiens
également avec beaucoup d'affection dans le tiroir de mon bureau les deux
pinceaux que j'utilisais quand je dispensais des cours. D’un autre côté, grâce
au travail développé à l’époque de la faculté, à la publication de notre
traduction de l’article de Richard Popkin dans la revue Sképsis et au master, même partiellement achevé, aujourd’hui,
au-delà d’être philosophe, je suis aussi traducteur. Et je suis également
traducteur grâce aux études des langues que je cultive tout au long de ma vie,
parmi lesquelles le français, dont l’intérêt pour les études a été le fruit de
l’influence directe du travail de direction qui a été initié à la faculté et
développé dans le master. Je le consolide chaque jour de ma carrière. Il est
aussi incroyable d’avoir l’opportunité de travailler avec les personnes de
différents lieux autour du monde. La pensée philosophique de Hume est vivante
chez moi, et aujourd’hui, si je peux ainsi dire, mon répertoire philosophique
est un peu plus varié, mais néanmoins, si on prend en considération toute la
tradition occidentale, il est encore tellement restreint, par conséquent, j’ai
l’intention de continuer les études, au-delà de la pensée de Hume et de la
pensée sceptique, de d’autres penseurs et penseuses. J’ai aussi l’intérêt pour
les études en philosophie française, surtout la pensée de la période du Siècle des Lumières. Avoir quelques
années de lecture à venir, qui sait, est un peu réconfortant.
Je suis reconnaissant de l’opportunité
d’avoir croisé sur mon chemin, chez le bouquiniste, ce livret avec « ses pages déjà jaunies ».
Sur la peinture :
Vincent van Gogh (1853 – 1890)
Champ de fleurs près d’Arles
Arles, mai 1888
Huile sur toile
Van Gogh Museum, Amsterdam (Vincent van Gogh Foundation)
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